rappeler, pourquoi fut possible de dire, dans cet idiome autrefois exquis, sensualitas, impassibilitas, et tous ces autres mots nécessaires cependant aux disputes des conciles. La Bible avait été le principe et le grand instrument de la réforme du latin, en introduisant, d’une part, les richesses poétiques de l’hébreu, et, d’autre part, les richesses philosophiques du grec. Mais la Bible elle-même et le christianisme, en ceci, furent servis par deux auxiliaires : d’un côté, par les Africains, de l’autre, par le peuple, c’est-à-dire, déjà à l’époque où nous nous trouvons, par un peuple à moitié barbare.
Je signale à votre attention ce fait, trop peu étudié, de l’intervention, de l’invasion des Africains dans les lettres latines et surtout dans les lettres chrétiennes au temps qui nous occupe. On a remarqué plus d’une fois que les lettres latines font en quelque sorte le tour de la Méditerranée : écloses dans ce berceau que formaient la grande Grèce et l’Étrurie, elles en sortirent pour passer les Alpes et trouver dans la Gaule des écrivains comme Cornélius Gallus, Trogue Pompée et leurs contemporains ; ensuite en Espagne, où se rencontrèrent des poëtes et des historiens d’un goût moins pur ; et enfin, un peu plus tard, en Afrique, où naquit la dernière, mais non la moins laborieuse génération qui apporta dans les lettres toute la fougue de son climat. Ce furent, au temps de Néron, Cornutus, disciple de Sénèque ; puis Fronton, maître de