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Ainsi la décomposition de la langue latine s’était déjà produite au temps de Cicéron, qui signalait avec regret, comme l’âge d’or de cette langue, l’âge de Scipion l’Africain. Pour Cicéron, comme pour bien d’autres, le siècle où il vivait causait sa tristesse, lui paraissait frappé de décadence, et il plaçait l’apogée bien loin de son temps Ce fut, dit-il, le.privilége du siècle des Scipions de bien parler comme de bien vivre ; mais, depuis,’ la multitude des étrangers a corrompu le discours. Quintilien dit. plus tard que tout le langage est changé, et il témoigne que, plus d’une fois, lorsque le spectacle tragique avait ému les esprits, les exclamations parties de tous les points du théâtre -avaient laissé entendre quelque chose de barbare qui venait donner un démenti à la langue pure que le poëte avait voulu parler[1] .

Ainsi, dès les premiers temps de l’empire, la corruption de la langue se déclare, le latin périt ce n’est donc pas le christianisme qui le tue, au contraire, c’est par le christianisme qu’il allait revivre.

Trois génies se partagent l’antiquité : le génie de l’Orient, c’est-à-dire celui de la contemplation, du symbolisme, parce qu’en contemplant la nature on découvre le langage du Créateur, celui de la, véritable poésie : qu’est-ce que la poésie sinon cette

  1. Tota saepe theatra, et omnem circi turbam exclamasse barbare scimus (Quint. Instit. Or. I I, c. VI)