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qu’il allait chercher, c’était le mystère de cette harmonie dont les orateurs grecs flattaient les oreilles avides de la multitude. On voit alors Cicéron, avec un art infini, une prodigieuse subtilité, rechercher dans Aristote, dans Éphore, dans Théopompe, les mesures diverses qui peuvent entrer dans une période oratoire pour la rendre plus nombreuse et plus satisfaisante à l’oreille. Ne croyez pas qu’il se permette de la composer au hasard de syllabes longues et brèves ; non, il lui faut un certain nombre de trochées, de peons et autres pieds, et Cicéron est encore tout plein d’un discours auquel il avait assisté dans sa jeunesse, où Carbon, tribun du peuple, terminant une invective impétueuse contre ses adversaires politiques, arrache les applaudissemen ts de la multitude par une phrase (rue couronnait le ditroché le plus harmonieux qu’on ait jamais entendu Patris dictum sapiens temeritas filii comprobavit. Ce mot comprobavit , avec ces deux longues alternées de deux brèves, avait tellement ravi et enchanté l’oreille de l’auditoire, qu’un long murmure d’approbation avait enveloppé l’orateur. C’est à ce point que les raffinements de l’euphonie avaient été poussés chez ce peuple, où il fallait qu’un joueur de flûte accompagnât l’orateur à la tribune afin de soutenir sa voix. En même temps, la poésie ne restait pas en arrière de soins, de zèle et de laborieuse application successivement les mètres de la Grèce avaient passé