Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 11.djvu/542

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

illustres morts. Au contraire, dès que la première aube de mai a pu nous faire croire au retour du printemps, l’avis des médecins nous a chassés de Pise, et nous sommes venus nous abattre comme une troupe de goëlands sur les rochers de San Jacopo, à un quart d’heure de Livourne. Je dis un quart d’heure si vous regardez à la montre, -mais. à cent lieues si vous regardez au paysage, à la tranquillité du séjour, la pureté de l’air. Saint-Jacques a le bon esprit de tourner le dos à la ville marchande, prosaïque, et d’ouvrir ses joyeuses fenêtres sur la mer du côté du midi. Devant nous la Méditerranée avec tout le prestige de ses eaux qui changent à toute heure, tour à tour étincelantes sous les feux du soleil, chatoyantes et moirées sous un ciel nuageux. C’est l’immensité, mais ce n’est pas la solitude ; des paquebots à vapeur, de grands navires de commerce, de petites barques de pécheur l’animent, et dans le lointain on découvre la Gorgone, Capraïa, l’île d’Elbe, la Corse. Ce beau tableau s’encadre entre les montagnes de la Spezia, que nous voyons couronnées de neige à notre droite, et à gauche le Montenero avec sa Madone, où pendant tout le mois de mai chaque village voisin ira en pèlerinage.

Ma femme adore ce pays, mais elle aime surtout les pêcheurs et leurs jolies barques à voiles latines ; elle a fait vœu que, si je guérissais, nous vendrions nos livres pour acheter un bateau et nous en aller