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de la rue, une église gothique du quinzième siècle, et le château fort de Charles V, édifice carré, d’une hauteur prodigieuse, dont les murailles ont défié nos boulets.– Vous voilà aussi rêveur que moi. Entrons, si vous le voulez bien, dans l’église, dans la maison de Celui qui est le Dieu des ruines et des résurrections. Déjà vous y voyez régner cette richesse, cet éclat que l’Espagne aima toujours dans ses temples tout y est blanc, et doré. Il faut finir par reconnaître quelque mérite dans les grands retables qui s’élèvent de l’autel jusqu’à la voûte, portant tout un paradis de tableaux et de statues. Les tableaux, bons ou mauvais, forment d’ordinaire un ensemble, et, comme on dit, un cycle religieux. Les statues, dans quelques endroits, sont si nombreuses qu’on dirait un peuple peint et doré.. Je me rends à la sculpture peinte, surtout depuis que je la sais justifiée par les exemples de Phidias et de Praxitèle. Mais je ne m’accoutume point à la sculpture habillée, à cette Mater dolorosa qui a une chapelle dans chaque église d’Espagne et qui porte le costume d’Anne d’Autriche, robe de velours noir, guimpe blanche, à la, main un mouchoir garni de dentelles, et de plus un poignard d’argent dans le cœur.

Cependant, le bon peuple espagnol prie très pieusement. Je ne lui trouve rien de froid ni de fanatique, et dimanche à la messe nous avons vu communier beaucoup de personnes, des jeunes gens