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Le jour est venu, dix fois je l’ai vu se lever sur Venise, et dix fois j’ai trouvé que mon rêve n’était pas évanoui : Venise m’a tenu bien plus que je ne m’en étais promis. Aucune église d’Italie, ni celle de Pise, dont j’aimais tant les belles colonnades, ni celle d’Orvieto avec ses bas-reliefs et ses peintures, ni le dôme de Saint-Vital de Ravenne, ni les mosaïques de Saint-Apollinaire, de Sainte-Marie Majeure et de la cathédrale de Montréal aucun monument religieux ne m’a paru plus instructif que Saint-Marc, qui réunit le style de l’Orient et celui de l’Occident, dont les mosaïques savamment disposées contiennent toute l’histoire du christianisme, tandis que les inscriptions qui couvrent ses murailles forment un grand poëme religieux.

Le palais ducal unit aussi d’une manière surprenante la sévérité et la légèreté. Rien de plus austère que ce grand mur percé de larges ogives béantes. Rien de plus hardi que de faire reposer cette masse sur une galerie découpée à jour où il y a si peu de pierres et tant de vide. On est effrayé surtout quand on considère l’angle qui fait le coin de la place et de la rive des Esclavons, ces colonnettes si grêles rappellent que tout l’édifice, la basilique, la place et la piazzetta reposent sur des pilotis, et que toute cette création de l’homme, comme celle de Dieu, est sortie de l’abîme. J’ai moins admiré les salles fameuses qui occupent