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tôt destinée aux mystères de quelque oracle, et à tromper par un jeu surprenant la crédulité des peuples.

Mais notre plus profonde, notre plus solennelle impression, c’était la vaste étendue de terrain occupée par la base d’édifices détruits et par des tombes, c’était la fatalité exterminatrice qui passa sur cette ville, autrefois composée de cinq parties, dont une seule est habitée aujourd’hui. Ennemie, longtemps heureuse, d’Athènes et de Rome, rivale deTyr et de Carthage, elle est aujourd’hui assise dans le silence et la solitude, comme ces cités coupables, maudites par Isaïe et pleurées par Jérémie. Ses deux vastes ports ne sont plus sillonnés que par les barques des pêcheurs, et à terre aussi loin que la vue peut s’étendre, on ne découvre que le rocher calcaire, mal caché par le gazon, creusé, taillé en tous sens, pour servir de fondations aux demeures, et d’asile aux dépouilles d’un peuple de quinze cent mille âmes. Si affligeant que soit ce tableau, il captive pourtant, en même temps qu’il accable ; il est grandiose, il est instructif ; et l’on voudrait avoir assez de loisir et assez de larmes, pour y méditer les éternelles illusions de l’orgueil humain.

Je ne vous parlerai pas des rencontres et des incidents de la route, bien qu’elle nous ait conduits par Lentini autrefois Leontium, patrie de plusieurs hommes illustres, et remarquable encore par des