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tout sur notre passage c’étaient des récits de vols et d’assassinats, qui effrayaient très-sérieusement rios guides. Défense aux aubergistes de laisser partir les voyageurs avant le jour. De loin en loin des rassemblements de troupes pour intimider les bandits, et pourtant sans cesse de nouveaux crimes. Nous avons eu le bonheur d’échapper à tous ces périls que nous croirions imaginaires, si les magistrats les plus graves ne nous en avaient assuré la réalité. La litière, véhicule souverainement incommode, les auberges où il pleuvait par le plancher, une nourriture détestable, tout ce qui pouvait nuire, ne nous a causé qu’une très-passagère fatigue, dont cinq jours de repos nous ont parfaitement remis. Enfin, depuis quelque temps des ouragans terribles régnent dans ces parages. Des navires ont péri vendredi dernier dans le golfe même de Naples, et nous venons d’avoir la plus heureuse traversée. Les inconvénients nombreux que je viens de résumer font qu’un voyage de Sicile ne saurait être une affaire d’agrément. Nous le savions d’avance, et s’il ne se fut agi que de santé et de plaisir, assurément nous ne l’aurions jamais entrepris. Mais il en est autrement si l’on se propose pour but l’étude d’abord, puis ensuite les hautes jouissances qui l’accompagnent. L’Italie déflorée par les récits des innombrables touristes, défigurée et souvent corrompue par le contact trop fréquent des étrangers, dépouillée de beaucoup de ses monuments par les