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manque pas de répandre sur les alliances contractées selon sa loi. L’œuvre que vous avez faite est bien grande ; elle suffirait pour honorer votre vie. Vos aînés de Paris en seront jaloux hélas ! leurs succès sont bien loin d’égaler les vôtres. Il est vrai que d’une part nous n’avons pas les avantages de position que vous avez ; nous n’avons pas non plus, comme vous, affaire à un peuple ardent, passionné, profondément sensible, accessible par là même aux émotions morales et religieuses. Nos pauvres gens sont d’une froideur et d’une indifférence désespérantes. Ce sont des natures usées par la civilisation matérielle, qui n’offrent plus de prise à la religion, qui n’ont plus le sens des choses invisibles ; qui tendent la main pour recevoir le pain, mais dont les oreilles demeurent presque toujours closes à la parole que nous leur annonçons. Oh ! que souvent nous souhaiterions de rencontrer des gens qui nous reçussent à coups de bâtons, pourvu que nous en trouvassions d’autres qui nous écoutassent, et qui nous comprissent ! Mais non ; ce sont des âmes énervées, qui nous reçoivent toujours de même, toujours avec la même réserve au bout d’un an qu’au premier jour, qui se garderont bien de contredire une seule de nos paroles, mais qui ne changent rien à leurs actions. Cependant il se fait de temps à autre quelque bien. Le bien se fait surtout parmi nous, qui nous soutenons et nous encourageons mutuellement.