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paroisse. Le matériel même de la ville a changé. Le canon des journées d’avril a renversé des maisons mais en revanche nos collines sont couronnées de forts tout neufs, avec des glacis bien verts, des murs bien blancs et des canons d’un beau bronze. Le commerce ne va guère et les ouvriers émigrent pour la Suisse mais nous avons une superbe garnison, des revues, des exercices à feu, des patrouilles, des sentinelles à tous les pas l’uniforme tapisse les quais, les grands sabres traînent agréablement sur les pavés des places publiques si quelques manufactures sont désertes, les maisons de débauche et les prisons sont remplies. En beaucoup d’endroits les canonnades et les pétards ont tellement désolé des quartiers entiers, qu’il a fallu refaire à neuf tous les devants de magasins. Nombre de gens ont déménagé, et rien ne me vexe plus que de ne pas retrouver à leur place les marchands chez lesquels j’avais coutume de me servir autrefois, ou les amis chez lesquels j’entrais en passant. En sorte que, dans ce pauvre Lyon, je ne sais plus m’orienter. D’un autre côté j’y ai trouvé de nouvelles jouissances : notre famille de Florence est venue se fixer parmi nous ; mon oncle, ma tante et mes cousines me témoignent la plus douce affection avec cela la tendresse de mon père, de ma mère et de mes deux frères, n’en est-ce pas assez pour me rendre heureux ?

Eh bien, mon cher ami, je crois pouvoir le dire