ces siècles mêmes dont on lui impule les malheurs.
L’historien Gibbon avait visité Rome dans sa jeunesse : un jour que, plein de souvenirs, il errait au Capitole, tout à coup il entendit des chants d’église, il vit sortir des portes de la basilique d’Ara Cœli une longue procession de franciscains essuyant de leurs sandales le parvis traversé par tant de triomphes. C’est alors que l’indignation l’inspira : il forma le dessein de venger l’antiquité outragée par la barbarie chrétienne, il conçut l’Histoire de la Décadence de l’Empire romain. Et moi aussi j’ai vu les religieux d’Ara Cœli fouler les vieux pavés de Jupiter Capitolin ; je m’en suis réjoui comme de la victoire de l’amour sur la force, et j’ai résolu d’écrire l’histoire des progrès à cette époque où le philosophe anglais n’aperçut que décadence, l’histoire de la civilisation aux temps barbares, l’histoire de la pensée échappant au naufrage de l’empire des lettres, enfin traversant ces flots des invasions, comme les Hébreux passèrent la mer Rouge et sous la même conduite, forti tegente brachio. Je ne connais rien de plus surnaturel, ni qui prouve mieux la divinité du christianisme, que d’avoir sauvé l’esprit humain.
On me reprochera peut-être un zèle inopportun,