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avaient considéré, avec Platon, la matière comme éternelle, comme existant à côté de Dieu ; ou bien ils pensaient, avec les philosophes alexandrins, que Dieu avait tiré et tirait de lui-même, par une émanation continuelle, tous les êtres ; saint Augustin le premier professe la création après le néant, car hors de Dieu il n’y avait rien dont le monde pût être formé, et, s’il avait été tiré de Dieu, il serait Dieu lui-même[1]. Ainsi saint Augustin établit le dogme de la création, et si vous lui opposez les difficultés philosophiques de cette doctrine, si vous lui dites : Mais la création est dans le temps et Dieu dans l’éternité ? mais pourquoi Dieu a-t-il créé ? quand a-t-il créé ? Dieu, avant de créer, qu’a-t-il fait ? Augustin répond avec une supériorité infinie : Dieu a créé le monde librement, mais non sans raison ; le Dieu bon a fait le monde pour faire le bien. « Il ne faut pas demander quand il a créé, ni s’il est sorti de son immutabilité en créant, ni ce qu’il faisait avant de créer, Il a éternellement voulu ; mais il a produit le temps avec le monde, parce qu’il a produit le monde en mouvement, mouvement dont le temps est la mesure.[2]. »

Il s’abandonne ainsi aux considérations les plus élevées, les plus hardies, les plus judicieuses, avec la plus grande rectitude et sans la moindre subtilité. Et, après avoir établi que le temps est la mesure du mouvement, il conclut par cette admirable parole : « Ainsi toute ma vie n’est que succession, dissipation. Mais votre main

  1. De civitate Dei, l. XII, c. XV. XVI, XVII.
  2. Confess., l. IX, c. XXIV