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bares campés sur ses ruines. Assurément il n’est pas de spectacle où éclate davantage la puissance de la raison humaine, mais je n’en connais pas non plus où se manifeste mieux son insuffisance. Car toute cette civilisation païenne, à la garde de laquelle avaient été mis le génie grec et le bon sens romain, périssait sans retour ; et, tandis que les images d’Aristote et de Platon à la porte de l’école n’empêchaient pas leurs derniers successeurs de s’abandonner à toutes les aberrations de la théurgie et de la superstition, la sagesse des Paul, des Gaïus, des Ulpien, des Papinien, n’avait pas non plus fermé les portes de l’Empire à tous les vices de la décadence. Dans cette société si savante et si polie, nous avons trouvé le fétichisme réduit en doctrine, la croyance des philosophes à la présence permanente des dieux dans les idoles, la prostitution religieuse et les sacrifices humains ; dans l’État, les gladiateurs, les eunuques encombrant le sérail des empereurs, derniers excès de l’esclavage que le christianisme devait faire disparaître ; les lettres elles-mêmes dégénérées, réduites à la domesticité d’un petit nombre de favoris ou au service d’une aristocratie corrompue. Bien plus, Alaric est aux portes de Rome, et l’on peut entendre au loin le galop des chevaux des Vandales, des Huns, des Alains, qui s’ébranlent à la suite de leurs chefs et mèneront bientôt Attila au pied des Alpes.

Ainsi on peut dire que toute la civilisation va périr, si un principe nouveau ne vient à son secours, ne la pénètre et ne parvient à la régénérer. Ce principe nou-