même d’acheter, selon l’ancien usage, un esclave rhéteur au marché ; mais, en même temps, elle fonde une instruction publique qui serve de modèle et de règle, ne laisse rien périr des richesses de l’esprit humain, et les transmette scrupuleusement de main en main et sous un contrôle sévère. Nous avons vu avec quelle ardeur, au cinquième siècle, cette tradition est relevée, cultivée par tout un peuple de grammairiens, de rhéteurs, de scoliastes ; comment ils s’attachent au texte des anciens, s’efforcent d’en déduire les règles de la langue, les principes de chaque science, et de renfermer enfin toutes les connaissances humaines dans le cadre de cette encyclopédie que Martianus Capella achève à Rome en 470. Au moment où l’empire allait crouler, il fallait à tout prix sauver les lettres. On aurait bien étonné Claudien, Rutilius, Sidoine Apollinaire et tout ce qui restait de poëtes ou de gens prenant ce nom, si on leur avait dit que la postérité leur préférerait beaucoup Donatus, Servius, Macrobe, ces savants obscurs, ces tyrans des syllabes ; et cependant la postérité avait raison : car c’est chez les commentateurs et les grammairiens qu’elle trouvait d’abord la langue antique, et, avec elle, l’ensemble des connaissances, des idées, qui représentaient toute l’expérience du monde ancien ; elle y trouvait tous les textes de la littérature classique, conservés avec une scrupuleuse exactitude, transmis avec une sollicitude qui n’avait pas laissé périr une page ; elle y trouvait enfin et par-dessus tout l’exemple du travail, de l’étude épineuse.
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