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térature des éléments qui en seraient sortis ; ce n’est pas le Tasse, Camoëns, Milton, qu’il faut accuser d’avoir ramené les muses païennes ; la mythologie, c’est le paganisme se perpétuant dans les lettres, comme il se perpétue par la superstition dans la religion, dans le droit, par l’oppression des faibles, par l’esclavage, par le divorce. De même que vous avez des astrologues qui continuent la science païenne, de même vous avez des mythologues qui continuent la littérature païenne.

La mythologie élait entrée profondément dans les mœurs de l’antiquité : Rome, disputée entre Bélisaire et Totila, conservait encore le prétendu vaisseau sur lequel Énée avait abordé aux rivages de l’Italie. À Bénévent on montrait les dents du sanglier d’Érymanthe, et, parmi les ornements que l’empereur devait porter dans les jours de fête, s’il venait à Rome, se trouvaient brodés le labyrinthe et le Minotaure, afin d’exprimer que la pensée de l’empereur devait être impénétrable à ses sujets.

Dans ces mosaïques qui font l’ornement et la beauté des églises de Ravenne et de Venise, nous retrouvons une quantité de sujets empruntés à la Fable. Ainsi on nous représente le baptême du Christ, et le Jourdain est figuré par un vieillard nu, la tête couronnée de roseaux et versant une urne qui s’épanche et qui forme le fleuve. On représentait la terre sous la forme d’une femme tantôt nue, tantôt toute couverte de fleurs ; l’abîme, sous les traits d’un homme vomissant des eaux. Les livres Carolins s’attachent à ces abus et les dénon-