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touchons à une des plaies vives du moyen âge. On a durement accusé les temps chrétiens d’avoir engendré, à la faveur de leurs ténèbres, l’astrologie, la magie, et aussi la législation sanguinaire qui réprimait ces délires. On oublie que les siècles classiques des sciences occultes sont les siècles les plus éclairés du paganisme. Elles prospèrent à Rome sous Auguste, elles grandissent dans Alexandrie, elles ont pour initiés les plus illustres des néoplatoniciens, Jamblique, Julien, Maxime d’Éphèse. Vainement Origène, surprenant le secret des adeptes, dévoile une partie de leurs artifices, par quels prestiges ils font gronder la foudre, apparaître les démons, parler les têtes de mort. La foule croit à des mystères qui ont pour elle le charme de la terreur. Les Césars s’inquiètent de cet art divinatoire qui se vante d’avoir annoncé leur avénement, mais qui prédit aussi leur chute prochaine. On voit les astrologues, sous le nom de mathématiciens, bannis par Tibère, persécutés pendant trois cents ans, proscrits enfin par une constitution de Dioclétien et de Maximien. C’est la législation des empereurs païens, continuée par Valentinien et Valens, introduite dans les lois d’Athalaric, de Liutprand et de Charlemagne, qui fonde le droit pénal du moyen âge en matière de sorcellerie. Le flambeau de la sagesse antique alluma les bûchers reprochés au christianisme[1].

  1. Origène, Philosophumena, edidit Miller, lib. IV, p. 62, 63, 71, 75. Suéton., in Tiberio. Cod. Justin., IX, 18, de Maleficis et Mathematicis. Ibid., II, 4, 5, 9.