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menaçants : le monde idolâtre avait les yeux sur eux, eux sur l’avenir, prêts à soutenir quiconque voudrait recommencer le rôle de Julien. En attendant, ils entretenaient à la cour assez d’intelligences pour obtenir les plus hautes dignités de l’Occident. Ils tiraient des sacerdoces païens un reste d’autorité et des revenus considérables. Leurs palais contenaient des villes entières ; leurs domaines embrassaient des provinces : ils n’avaient qu’à recruter sur leurs terres pour lever des armées d’esclaves et de clients. Enfin ils donnaient des jeux publics et disposaient ainsi du seul moyen qui restât de soulever les passions du peuple.

Au commencement du cinquième siècle, l’aristocratie païenne n’a pas de représentant plus illustre, ni plus capable de l’honorer par son éloquence et sa sagesse, que le préfet de Rome, Symmaque. Ses contemporains admiraient ce facile génie, plié à toutes les études comme à toutes les affaires. Ses lettres, souvent comparées à celles de Pline, charmaient les hommes de goût qui auraient voulu les voir écrites sur des rouleaux de soie. Il avait célébré en vers gracieux les rivages de Baïa, cette terre de volcans couronnée de pampres. Il avait pris rang parmi les orateurs par ses panégyriques, où il épuisait pour des empereurs chrétiens le langage de l’idolâtrie. Un esprit si actif devait vivre en commerce avec les plus beaux esprits de son temps. Il écrit au poëte Ausone et le compare à Virgile ; Ausone lui répond et le met à côté de Cicéron. Il a toute la primeur des lectures et des déclamations publiques.