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et commence à remonter. Mais, quelle que soit la durée de l’épreuve, le terme en est certain. Un temps doit venir, où les bons et les mauvais se retrouveront confondus au sein de l’âme universelle[1].

Assurément cette doctrine avait de l’élévation et de la grandeur. Quand elle parlait du Dieu souverain, qu’elle le déclarait unique, immatériel, impassible, il semble qu’il ne lui restait plus qu’à briser les idoles. Quelques-uns de ces dogmes étonnaient les chrétiens, qui les crurent dérobés à l’Évangile, et plusieurs modernes ont accusé le christianisme de s’être enrichi des dépouilles néoplatoniciennes. Cependant, sans nier les emprunts que les Alexandrins avaient pu faire à une religion nouvelle publiée depuis deux siècles, il faut avouer que toutes leurs spéculations tournent au paganisme. Premièrement, le principe que Plotin mettait au faîte des choses n’avait rien de commun avec le Dieu vivant des chrétiens. Pendant que les chrétiens reconnaissent à la cause première des perfections qui la rendent souverainement intelligible et souverainement aimable, Plotin dépouille son premier principe de tout attribut : il lui refuse la pensée, la vie ; il ne permet pas de le définir ni d’en rien affirmer. Il en fait une abstraction qu’on ne peut ni connaître ni aimer, un dieu illogique et immoral, ce qui est le propre des divinités païennes. Secondement, le même abîme sépare la trinité de Plotin d’avec la nôtre. Dans la trinité chrétienne,

  1. Plotin, Enn. V, I, 1 ; Enn. IV, IV, 4 ; Enn. I, II, 1 ; Ravaisson, ibid., p. 445 ; Jules Simon, ibid., p. 589.