Cicéron décriait publiquement les augures ; mais, dans son Traité des Lois, traçant le plan d’une république idéale, il y institue des augures dont les décisions obligeront sous peine de mort. Sénèque avait livré à la dérision le service des idoles ; il n’en conclut pas moins que le sage les adorera et qu’il pratiquera les cérémonies, en y honorant la coutume et non la vérité. Ainsi les stoïciens justifiaient le culte public par la raison d’État ; en même temps ils sauvaient la mythologie par leurs interprétations allégoriques[1]. Ils divinisaient la nature comme un principe actif circulant sous des formes diverses et qu’on pouvait adorer sous autant de noms : ils permettaient qu’on l’appelât Jupiter en tant qu’il donne la vie, Junon dans l’air, Neptune dans l’eau, Vulcain dans le feu. Mais ces explications n’étaient que les préludes du travail prodigieux par lequel l’école d’Alexandrie entreprit de réconcilier la raison avec la religion de l’empire.
L’histoire n’a rien de plus connu que l’école d’Alexandrie. On sait comment le néoplatonisme passa d’Orient en Occident, s’établit à Rome, et y concourut à cette restauration politique du paganisme commencée par Auguste, soutenue durant trois cents ans par les Césars, prolongée jusqu’au cinquième siècle par l’opiniâtreté d’une aristocratie qui défendait ses intérêts en même temps que ses dieux.
- ↑ Cicéron, de Legibus, II, de Natura Deorum, II, 24 ; Sénèque, cité par S. Augustin, de Civit. Dei, VI, 10 ; Diogène Laërce, VII, 147 ; S. Augustin, de Civit. Dei, liv. VI et VII tout entiers ; Ravaisson, ssai sur la métaphysique d’Aristote, t. II, p. 161.