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livrer aux ariens la basilique de Milan, saint Ambroise, avec tout le peuple catholique, passait les jours et les nuits dans le saint lieu ; pour charmer les ennuis des longues veilles, l’évêque introduisit le chant des hymnes déjà reçu dans les églises d’Orient. Bientôt la douceur du chant sacré gagna tout l’Occident, et le christianisme eut une poésie lyrique. En même temps il voyait commencer une poésie épique dans les vers de Juvencus, de Sedulius, de Dracontius. Déjà l’on peut dire avec un ancien : Nescio quid majus nascitur Iliade. Non que le génie moderne doive jamais égaler l’incomparable perfection des formes homériques ; mais parce que l’humanité a retrouvé l’épopée universelle et véritable dont toutes les autres n’étaient que des ombres, l’épopée de la chute, de la rédemption, du jugement, qui traversera les siècles pour arriver à Dante, à Milton, à Klopstock.

Mais, dès le cinquième siècle, deux poëtes chrétiens se détachent de la foule. C’est d’abord saint Paulin, dépouillant les honneurs de sa naissance et l’éclat de sa fortune, pour aller vivre au tombeau de saint Félix de Nole, et célébrer la paix de cet asile dans des vers dont la grâce est déjà tout italienne. Et qui ne croirait assister de nos jours aux pèlerinages des paysans napolitains, quand Paulin représente la basilique du saint resplendissante du feu des cierges, les draperies blanches suspendues aux portiques, le parvis jonché de fleurs, tandis que les pieux visiteurs arrivent par troupes, et que les montagnards descendent de l’Abruzze, portant