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On connaît le songe de saint Jérôme, et la flagellation que les anges lui infligèrent pour avoir trop aimé Cicéron. Il ne paraît pas cependant que son repentir fût de longue durée, puisqu’il faisait passer les nuits aux moines de la montagne des Oliviers pour lui copier des dialogues de Cicéron, et que lui-même ne craignait pas d’expliquer les poëtes lyriques et comiques aux enfants de Bethléem.

Pendant que l’éloquence païenne, chassée du Forum, n’a plus d’asile que dans les auditoires des rhéteurs et dans les mensongères solennités où se prononcent les panégyriques des Césars, une éloquence nouvelle a trouvé sa première chaire aux Catacombes, et ses inspirations au fond des consciences. Saint Ambroise la règle déjà, et les préceptes de la prédication remplissent un chapitre de son livre de Officiis, Saint Augustin les développe ; dans son traité de Doctrina christiana, il ne craint pas d’emprunter à la rhétorique des anciens tout ce qui convient à la gravité de la parole évangélique. Nous entendrons ces orateurs tout à la fois savants et populaires, Pierre Chrysologue, Caudentius de Brescia, Maxime de Turin. Mais tout leur éclat sera effacé par un autre prédicateur, qui ne s’adresse plus à quelques milliers d’hommes, mais à l’Occident tout entier. Au milieu des désordres de l’invasion, Salvien s’est chargé de justifier le gouvernement de Dieu. L’éloquence n’aura jamais de cris plus formidables que sur les lèvres de ce prêtre, quand il célèbre les funérailles du monde romain, quand il le montre expirant dans le rire et se