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moines ; les langues modernes le traduiront déjà qu’elles en seront encore à leurs premiers bégayements. Donatus devient si populaire, que son nom est le nom même de la grammaire dans les écoles du moyen âge, qu’il n’y a pas d’étudiant si pauvre qui ne possède son Donat, et que nous trouvons une grammaire provençale sous le titre de Donatus Provincialis. Le moyen âge ne s’attachait pas sans raison à ces maîtres qui lui avaient donné l’exemple du travail, plus nécessaire que le génie. Le génie n’est que d’un moment, et Dieu, qui ne le prodigue pas, veut apparemment que le monde sache s’en passer. Mais Dieu n’a jamais laissé manquer le travail. Il le distribue d’une main libérale, comme un châtiment et comme un bienfait qui efface les différences entre les siècles et entre les hommes. Le génie ravit une intelligence pour quelques heures, il l’élève bien au-dessus de la condition commune ; mais le travail vient la rappeler de ces hauteurs où elle s’oublierait, et la faire redescendre au niveau des mortels. Lorsque Dante, porté par l’inspiration, arrive aux dernières sphères de son Paradis, quand l’essor de sa pensée pénètre jusqu’au seuil de l’infini, on hésite, on ne croit plus à l’égale destinée des âmes. Mais quand on voit ce grand homme, dans l’intervalle de ses chants, se consumer d’études, suer sur les bancs, pâlir sur les livres, comme le dernier des écoliers de son siècle, on se rassure, messieurs, on trouve que l’égalité est rétablie et que les petits sont vengés.

Nous savons maintenant que l’antiquité ne devait pas