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une épopée sacrée. Dante la conçut ainsi, et de ses méditations sortit ce poëme patriotique et théologique, écrit pour un pays dont il remue toutes les passions, et pour la chrétienté dont il glorifie les croyances ; pour le moyen âge dont il représente les crimes, les vertus et le savoir ; pour les temps modernes qu’il devance par la grandeur de ses pressentiments ; un poëme, enfin, tout retentissant des frémissements de la terre et des chants du ciel.

 . . . . . Poema sacro

A cui ha posto man cielo e terra
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Et maintenant, s’il ne faut pas oublier les travaux plus humbles qui sont la condition du grand nombre, s’il faut parler de l’industrie et des biens terrestres, je reconnais que le moyen âge avait sur plusieurs points conservé, retrouvé, agrandi la richesse matérielle du monde ancien. On sait déjà comment les croisades rendirent aux Latins toutes les grandes voies commerciales que l’antiquité s’était ouvertes du côté du Levant, comment l’apostolat religieux les poussa plus loin et jusqu’aux extrémités de l’Asie. On a vu les moines recueillir les traditions de l’agriculture romaine, reconquérir pied à pied par le travail volontaire les terres abandonnées par l’oisiveté des esclaves, et porter les préceptes des Géorgiques sur les bords du Weser et de l’Elbe. Il resterait à montrer les vieilles villes sauvées de la fureur des barbares ou renaissant de leurs cendres, grâce au courage de leurs évêques, au respect, aux im-