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ORNEMENTS DE LA RENAISSANCE.


Partie inférieure qui montre la naissance de la moulure d’un petit pilastre, de l’église Sta. Maria dei Miracoli, Venise.
téristiques de cette école admirable d’émailleurs, qui, par leurs productions pendant le quinzième siècle, et plus encore par celles du seizième siècle, disséminèrent de tous les côtés quelques uns des ornements les plus élégants qui aient jamais été appliqués aux ouvrages en métal.

Vers la fin du quatorzième siècle, les artistes de Limoges trouvèrent non seulement, que les émaux de l’ancien genre champlevé — dont nous avons donné, dans le but de montrer le contraste, de nombreux exemples, planche LXXVII., figs. 1, 3, 4, 8, 29, 40, 41, 50, 53, 57, 61 — avaient entièrement passé de mode, mais que presque tous les orfèvres importaient d’Italie les émaux transparents, ou en faisaient eux-mêmes, avec plus ou moins de succès, selon le talent de chacun. Dans cet état des choses, ces artistes, au lieu de tenter la concurrence, inventèrent un procédé tout nouveau, qui ne regardait que l’émailleur, et qui mit celui-ci à même de se dispenser entièrement du burin de l’orfèvre. Les premières tentatives étaient fort grossières, et il n’en reste que peu d’exemples. Que les progrès étaient lents, c’est prouvé par le fait, que les premiers spécimens qui aient quelques prétentions au mérite, remontent au milieu du quinzième siècle. Quant au procédé, le voici : On traçait le dessin à l’aide d’une pointe aiguë, sur une plaque dépolie de cuivre, qu’on couvrait d’une couche mince d’émail transparent. Après avoir passé une ligne épaisse et noire sur le tracé, l’artiste remplissait les intervalles de différentes couleurs, transparentes pour la plupart, pendant que les lignes noires faisaient le même emploi que tiennent les bandes d’or dans l’ouvrage cloisonné. C’est la carnation qui offrait le plus de difficulté ; on la couvrait d’abord de noir, sur lequel on modelait ensuite les grandes lumières et les demi-teintes, à l’aide d’un blanc opaque, auquel on donnait parfois quelques touches de rouge transparent. La dernière opération qui restait à faire, c’était d’appliquer la dorure et de fixer les imitations de pierres précieuses : — la dernière trace presque de l’école byzantine, qui avait autrefois exercé une si grande influence en Aquitaine.

L’ouvrage fini présentait une apparence semblable à celle d’un émail grossier et transparent, — ressemblance qui était probablement préméditée, d’autant plus que les spécimens de cet émail n’étaient jamais fort grands, et par conséquent ils étaient parfaitement adaptés à remplacer l’ivoire dans la construction de ces petits triptyques, accessoires indispensables dans les appartements et les oratoires des riches pendant le moyen-âge. Aussi, trouvons nous, que tous les premiers émaux peints ont la forme d’un triptyque ou d’un diptyque, ou bien qu’ils avaient formé partie de l’un ou de l’autre ; il en existe encore bon nombre qui sont garnis de leur monture originale de laiton, et les antiquaires croient qu’ils sont sortis de l’atelier de Monvearni, car ils portent généralement le nom ou

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