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c'étaient des abeilles. Elles accourent partout où l'airain retentit. Bacchus réunit leurs troupes vagabondes, et les enferme dans le creux d'un arbre; aussi lui offre-t-on le miel, puisque c'est à lui qu'on le doit. [3, 745] Dès que les satyres et le vieillard à tête chauve eurent goûté de cet aliment nouveau, ils cherchaient partout dans les forêts ces rayons dorés. Silène entend bourdonner un essaim dans un vieil orme rongé par les années; il aperçoit aussi la cire, et ne dit mot. Nonchalamment assis sur le dos de son âne, qui plie sous cette lourde masse, [3, 750] il le pousse contre l'orme au tronc décrépit; il se lève alors, se soutenant à une forte branche, et sa main avide va dépouiller l'arbre de ses trésors; mille frelons, réunis soudain, enfoncent leurs aiguillons dans la tête chauve du vieillard, et marquent son front de mille piqûres; [3, 755] il tombe pesamment, et reçoit les ruades de son âne. Il appelle les siens, et demande du secours. Les satyres arrivent de tous côtés; ils ne peuvent voir sans rire la figure toute gonflée de leur père, qui s'en va boitant, le genou meurtri; Bacchus lui-même s'en égaie, et conseille à Silène un emplâtre de boue; [3, 760] celui-ci obéit et se barbouille de boue tout le visage.

C'est à bon droit que le miel est offert à Bacchus, et que nous versons dans les liba brûlants le miel le plus pur, pour le donner au dieu à qui nous devons ce présent.

Pourquoi prend-on ces gâteaux de la main d'une femme? la raison n'en est pas cachée: Bacchus ne conduit-il pas les choeurs de femmes, le thyrse à la main? [3, 765] Mais pourquoi est-ce une vieille? cet âge est adonné au vin: il a un faible pour les présents de la vigne féconde. Pourquoi est-elle couronnée de lierre? le lierre est cher à Bacchus; pourquoi? sur-le-champ je puis le dire. C'est avec ce feuillage que les nymphes de Nysa cachèrent le berceau du dieu enfant, [3, 770] pour le dérober aux recherches d'une marâtre.

Il me reste à découvrir pourquoi les enfants reçoivent la toge libre le jour de ta fête, dieu éblouissant de beauté! Est-ce parce que tu réunis les grâces de la jeunesse et celles de l'enfance, et que tu tiens toujours le milieu entre ces deux âges, [3, 775] ou bien est-ce à cause de ce nom de père, que les pères recommandent à tes soins et à ta protection divine leurs enfants chéris? ou bien est-ce parce que tu es appelé Liber, que l'on prend sous tes auspices la toge libre, au moment où l'on va vivre aussi avec plus de liberté? Est-ce, enfin, parce que dans ces temps où nos ancêtres étaient tout entiers à l'agriculture, [3, 780] où le sénateur faisait valoir lui-même l'héritage paternel, où le consul quittait la charrue recourbée pour les faisceaux, où l'on ne rougissait pas d'avoir les mains durcies par le travail, le peuple de la campagne venait à Rome pour assister aux jeux? Alors on célébrait les fêtes pour les dieux, et non pour l'esprit. [3, 785] Le père de la vigne avait des jeux à son tour; il les partage maintenant avec la déesse qui porte