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consternée à cet oracle mystérieux. Un augure, dont le nom s'est perdu dans la suite des âges, exilé récemment de l'Étrurie, [2, 445] s'avise d'immoler un bouc; il se fait un fouet de la peau de la victime, coupée en lanières, et les femmes, dociles à l'ordre qu'elles en reçoivent, viennent s'offrir à ses coups. La lune ramenait pour la dixième fois dans les cieux son croissant renouvelé: l'époux était devenu père, les épouses avaient enfanté. Grâces te furent rendues, ô Lucine! et c'est ce bois sacré lui-même qui te donna ce nom; [2, 450] ou peut-être vient-il de ce que tu es la déesse à qui nous devons de voir le jour. Sois donc bonne et propice, ô Lucine, à la jeune épouse enceinte; prête-lui ton secours, et qu'elle soit délivrée doucement et à temps du fardeau qu'elle porte dans son sein.

Avec le jour qui se lève finit le temps où les vents n'étaient pas trompeurs; désormais, cesse de te fier [2, 455] à leurs haleines inconstantes: les portes de la prison d'Éole ne vont pas se fermer de six jours. Déjà le jeune Verseau disparaît, tenant toujours son urne penchée.

Poissons, c'est vers vous que se dirigent les chevaux du soleil. Astres voisins aujourd'hui dans le ciel, vous étiez autrefois frères dans les ondes, [2, 460] où votre dos humide porta deux divinités. Alors que Jupiter combattait pour l'empire du ciel, Dionée, fuyant l'horrible Typhon, était parvenue jusqu'à l'Euphrate, emportant avec elle Cupidon enfant; elle s'était assise sur les bords du fleuve qui arrose la Palestine; [2, 465] l'extrémité de la rive était plantée de peupliers et de roseaux; mais ce fut surtout en voyant des saules que Dioné espéra se dérober à tous les regards. Elle s'y cache; mais soudain le vent mugit dans la forêt; pâle de frayeur, elle se croit tombée déjà entre les mains de ses ennemis; elle presse son enfant sur son sein, et s'écrie: "Nymphes, secourez-nous! [2, 470] sauvez deux divinités!" Elle dit et s'élance: deux poissons jumeaux la reçoivent, et c'est à cause de ce bienfait que nous les voyons aujourd'hui briller dans les cieux; jamais, depuis ce temps, le poisson n'a paru sur la table des Syriens; ils craindraient, en mangeant un poisson, de commettre un sacrilège.

[2, 475] Le jour qui vient ensuite est sans fête; mais le troisième est consacré à Quirinus: tel est le nom nouveau sous lequel Romulus est adoré, soit parce que, dieu guerrier, il a voulu porter dans l'Olympe le nom du javelot, qui s'appelait curis chez les anciens Sabins, soit parce que, roi des Quirites, il en adopta le nom, [2, 480] soit enfin parce qu'il a réuni Cures au territoire de Rome. Lorsque Mars, qui préside à la guerre, eut vu les nouveaux remparts que venait d'élever Romulus, après être sorti vainqueur de mille combats: "O Jupiter! s'écria-t-il, Rome est assez forte maintenant, et peut se passer du bras de Romulus; [2, 485] rends un fils à son père; qu'il me tienne lieu de celui que j'ai perdu; qu'il me rappelle et me rende Rémus. La voûte