Page:Ovide - Œuvres complètes, trad Nisard, 1838.djvu/582

Cette page n’a pas encore été corrigée

Janus a passé; l'année s'avance, et mon poème avec elle; nouveau mois, nouveau chant. Voici la première fois, ô ma muse, que tu vogues à pleines voiles; il fut un temps, je m'en souviens, où tu étais chose légère; [2, 5] messagère docile, tu servais mes amours, et tes faciles préludes ont charmé mes jeunes années. Aujourd'hui je chante les fêtes de nos dieux, et l'ordre des temps, consacré par les Fastes: à mon point de départ, qui eût pensé que je devais atteindre ces hauteurs? Ici est mon champ de bataille: ici je me sers des armes que je puis porter, [2, 10] et ma main ne demeure pas inactive. Si je ne sais pas lancer le javelot d'une main robuste, ni serrer les flancs d'un coursier belliqueux, ni me couvrir la tête d'un casque, ni ceindre une épée tranchante, assez d'autres le feront mieux que moi: [3, 15] mais de ce coeur qui vous appartient, ô César, s'exhaleront vos louanges, et je chanterai la gloire de votre nom. Venez donc, et accueillez avec un sourire mon offrande, si le soin de pacifier la terre vous laisse quelque loisir.

Februa, chez nos pères, signifiait cérémonie expiatoire, [2, 20] et en plus d'une circonstance aujourd'hui, cette étymologie peut se reconnaître encore. La laine que les pontifes reçoivent du roi des sacrifices et du flamine s'appelait Februa dans l'ancien idiome, ainsi que le froment brûlé et le sel que le licteur porte dans les maisons désignées pour être purifiées, [2, 25] ainsi que le rameau qui, coupé sur l'arbre pur, couronne le chaste front des prêtres. Moi-même j'ai vu une flamine demander les februa, et on lui donna une branche de pin. Enfin tout ce qui est expiation pour la conscience de l'homme [2, 30] était désigné sous ce nom chez nos ancêtres à la longue barbe. Ce mois s'appelle donc Februarius, parce que le Luperque asperge alors tous les lieux d'eau lustrale, avec des lanières de cuir, et en chasse ainsi toute souillure, ou bien parce qu'on apaise alors les mânes des morts, et que la vie recommence plus pure, une fois les jours passés des cérémonies funèbres.

[2, 35] Il n'était pas d'impiété, pas de crime funeste que nos aïeux ne crussent pouvoir effacer par l'expiation. Les Grecs, les premiers,