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qui, les premiers, s'inquiétèrent de cette science, jaloux de pénétrer jusque dans la demeure des dieux. Sans doute, en même temps qu'ils détournaient leurs regards de cette fange terrestre, ils perdaient de vue aussi les passions humaines. [1, 300] Rien n'arrêta l'essor de ces âmes sublimes, ni Vénus, ni le vin, ni les travaux du barreau, ni les fatigues de la guerre; l'ambition mobile, la gloire aux attraits menteurs, la soif de l'or n'ont pu les séduire; [1, 305] ils ont rapproché de mes yeux les astres si éloignés de la terre, et la voûte éthérée est devenue la conquête de leur génie. C'est ainsi qu'on atteint les cieux, et non pas en entassant l'Ossa sur l'Olympe, et en faisant toucher aux étoiles la cime du Pélion. Nous aussi, guidés par ces illustres devanciers, nous voulons mesurer les cieux [1, 310] et placer sous chaque signe le jour qui lui correspond. À la troisième nuit qui précède les Nones, quand les gouttes de la rosée céleste auront humecté la terre, vous chercherez en vain à découvrir le Cancer aux huit pattes : il s'est plongé dans les mers du couchant. [1, 315] Voici les Nones. Des torrents de pluie, tombant du noir séjour des nuages, t'annoncent le lever de la Lyre.

Quatre jours après, viennent les Agonales: on sacrifie à Janus. C'est de toi sans doute que cette fête a reçu son nom, ministre des autels, [1, 320] qui immoles la victime offerte aux dieux; lorsque, relevant tes vêtements, tu t'apprêtes à rougir d'un sang fumant le couteau sacré. "Frapperai-je?" dis-tu; et tu frappes seulement quand l'ordre est donné. D'autres, remarquant que la victime ne se présente pas spontanément, mais qu'on la conduit à l'autel, font dériver ce nom de cette action même; [1, 325] d'autres pensent que les Agonales s'appelaient agnales chez nos pères, et retranchent une lettre dans le mot; enfin, agonia n'exprimerait-il pas la frayeur qui saisit l'animal, quand, à travers l'eau des bassins, il voit briller le fer qui va lui donner la mort? Selon quelques-uns, [1, 330] ce jour porterait le nom grec des jeux auxquels se livraient nos ancêtres. Troupeau, dans le vieux langage, se disait agonia, et je ne reconnais pour vraie que cette dernière étymologie. Ce qui n'est pas moins certain, c'est que le roi des sacrifices doit immoler aux dieux, non la brebis à la toison épaisse, mais le bélier, son époux.

[1, 335] L'animal qui tombe sous une main victorieuse s'appelle victime, et hostie quand une agression hostile vient d'être repoussée. Jadis, avec un peu de froment et quelques grains d'un sel brillant et pur, l'homme se conciliait la bienveillance des dieux. [1, 340] Un vaisseau étranger n'avait pas encore traversé les mers pour nous apporter les pleurs de la myrrhe; l'Euphrate ne nous avait pas encore envoyé l'encens, ni l'Inde la plante du costus; on ne connaissait pas le safran aux filaments empourprés; on ne voyait fumer sur les autels que l'herbe sabine et le laurier qui