de trop élever son vol, et il ne bâtit point son nid sur les branches, ni à la cime des arbres. Il rase les sillons de ses ailes, et dépose ses œufs dans les broussailles. Le souvenir de son ancienne chute lui fait redouter les hauteurs.
IV. Déjà Dédale, épuisé de fatigue, était parvenu en Sicile ; et s’armant à sa prière, Cocale prenait généreusement sa défense. Athènes venait d’être affranchie, par le glorieux exploit de Thésée, d’un lamentable tribut. Les temples sont ornés de guirlandes : on invoque Pallas, déesse des combats, Jupiter et les autres dieux : le sang des victimes coule en leur honneur au pied des autels surchargés d’offrandes et parfumés d’encens. La Renommée avait au loin répandu le nom de Thésée dans les villes de l’Argolide ; et les peuples qui habitent la riche Achaïe imploraient le secours de son bras dans leurs pressants dangers : ce bras devint l’appui de Calydon, qui, bien que protégé par Méléagre, l’avait en suppliant appelé à sa défense. L’objet de ses alarmes, c’était un sanglier vengeur de Diane et l’instrument de sa colère. Œnée, disait-on, comblé des faveurs d’une année abondante, en avait offert les prémices aux dieux ; à Cérès, les grains ; à Bacchus, le vin dont il est le père ; à la blonde Minerve, l’olive qui rappelle ses bienfaits. Après les divinités propices aux récoltes, tous les dieux obtinrent ces honneurs dont ils sont si jaloux : Diane seule vit refuser l’encens à ses autels délaissés. Les dieux aussi sont accessibles au ressentiment : « Je ne souffrirai pas que cette offense reste impunie, dit-elle ; on vit l’insulte, on verra la vengeance » ; et la déesse envoie dans les champs de Calydon un sanglier vengeur de son injure. Égal en grosseur aux taureaux que nourrissent les pâturages de l’Épire, il surpasse ceux qui paissent dans les campagnes de la Sicile. Le sang et la flamme jaillissent de ses yeux ; des soies aiguës arment sa tête, et la hérissent comme une épaisse forêt de dards ; son dos se dresse comme un rempart de javelots : il fait écumer en rugissant une sueur fumante sur ses larges épaules : ses dents égalent en longueur l’ivoire de l’Inde : sa gueule vomit des feux aussi bruyants que la foudre, et son ardente haleine embrase le feuillage : il saccage les moissons naissantes, ou les détruit quand elles sont mûres, change en larmes les douces espérances du laboureur, et anéantit à la fois les épis et les bienfaits de Cerès : l’aire et les granges attendent en vain les gerbes que les champs ont promises. Il renverse les ceps et les grappes pendantes, et l’olivier toujours vert avec ses rameaux chargés de fruits. Il étend sa furie sur les troupeaux : les bergers et les chiens sont impuissants à les défendre, et les plus fiers taureaux ne peuvent protéger les génisses. Les habitants des campagnes fuient de tous côtés, et ne se croient en sûreté qu’à l’abri des remparts de la ville ; Méléagre assemble