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donc les protéger, ces innocents ? qui pourra les secourir dans leurs petits besoins, si ce n’est leur père… pour le nom, du moins ; car ils portent votre nom, ces malheureux. Vous êtes un honnête homme, un homme d’honneur incapable de les abandonner. Vous vous en chargez, pas vrai ?

— Dites donc, vous, la femme, répliqua Schérer, la voix troublée par l’excès de l’étonnement, est-ce qu’ils sont à moi, ces enfants ? Vous pouvez les remettre où vous les avez, pris.

— Ah ! mon Dieu ! s’écria madame Fressurey en pleurant, je m’y attendais. Faut-il donc qu’ils soient à ma charge, moi, pauvre femme, qui ne sais où donner de la tête ?

— Vous, comme l’autre, s’écria Schérer, vous avez abusé de ma sensibilité.

— C’est-il la faute de ces petits malheureux ? Que nous soyons tous punis, bon ; mais eux, les innocents, c’est pourtant eux qui vont porter le plus dur.

Les invalides s’étaient rassemblés au bruit et formaient un cercle autour des interlocuteurs, intéressés par cette scène touchante.

— Qu’est-ce que j’y fais, à ces enfants ? dit Schérer d’un ton plus digne.

— Ce que vous leur faites ? Mais, mon Dieu, il va leur arriver le plus grand malheur : je suis sans ressources, je vais être forcée de les mettre à l’hôpital.

— À l’hôpital ! dit Schérer en bégayant.

— Dame ! où voulez-vous que je les mette, puisqu’ils mourront de faim avec moi ?