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roule de roc en roc au fond d’un précipice ; il répondit d’une voix étouffée :

— Rien du tout.

— Eh bien, ça te sera retranché au premier jour, voilà comme ça marche. Au premier moment, psit ! et cours après.

— Ah ! si j’y courrai ? s’écria Schérer, j’irai mettre le feu chez eux. Voilà mon genre, à moi ; on ne me connaît pas.

— Je te plains toujours bien. Un homme d’âge ! te voilà pas moins lié pour le restant de tes jours.

— Canailles ! disait Schérer, aussi vrai que tu t’appelles Lapointe, je ferai des malheurs dans cette maison-là. Je te remercie toujours, tu es un vrai ami. À ta santé !

— Moi de même, dit Lapointe avec un sanglot ; car il avait le vin tendre, et le moment était venu pour lui de lâcher la bride à sa sensibilité. — Si tu savais, mon pauvre Schérer, reprit-il en versant des larmes, combien je t’ai regretté quand tu as fait cette folie-là ! Vois-tu bien, moi, Lapointe, je t’ai toujours porté de l’intérêt, mon bonhomme.

Ils en étaient là de leurs élans mutuels quand la mère Misu, en personne, vint les avertir qu’il était temps de se retirer. Elle les trouva tous deux en pleurs, se livrant aux plus vives démonstrations d’amitié ; et quand la digne femme eut réussi à se faire payer les frais du repas, elle les poussa ; se tenant tous deux embrassés, vers la porte qu’elle leur ferma rudement sur les talons, selon le cérémonial dès longtemps en usage dans son établissement.

Je ne décrirai pas la marche sinueuse de mes héros, ni leur arrivée providentielle dans l’Hôtel ; j’ai hâte de courir