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— Mais, cher frère, je n’aurais pas cru que tu fusses précisément menacé de cela, vu tes contenances à table.

— Oui bien, nous mourrons de faim, notre oncle, car tout est empoisonné ; tout étant empoisonné, nous ne mangerons plus, et cela ne peut nous mener loin. C’est pourquoi, si vous m’en croyez, nous irions déjeuner loin d’ici. Allons, sus, notre-oncle, levez-vous.

— Je ne saurais quitter si brusquement mon neveu ; mais nous irons, si tu veux, faire une promenade matinale dans la campagne pour te remettre. Aussi bien je n’ai point l’estomac net, et ce qu’on a dit à souper sur le raffinement des comestibles m’a causé beaucoup de dégoût.

— Levez-vous donc et marchons, et allons-nous-en bien loin, il nous viendra peut-être un bon avis.

L’oncle s’habilla à la hâte, en causant des merveilles qu’il avait vues depuis son arrivée ; à quoi frère Paul, indigné, ne répliquait mot ; et comme personne n’était encore levé dans la maison, ils sortirent sans qu’on pût les voir et les gêner dans leur dessein.

Ils parcoururent un grand nombre de rues jusqu’à la barrière, et marchèrent dans la campagne aussi loin qu’ils purent.

— Car, disait frère Paul, je sens de loin l’étable, et il me semble que je m’en retourne chez nous ; ô Catherine ! ô Louison ! quand pourrai-je embrasser vos vaches qui nous donnent de si bon lait ?

— Tais-toi, dit l’oncle Scipion, tais-toi donc, ce que tu dis là m’aiguise l’appétit.

— Et moi, dit frère Paul, je meurs de faim ; faim ou