Page:Ourliac - Nouvelles.djvu/237

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

côté, et le conducteur, criant plus haut encore, voulut bien enfin ouvrir la portière. Frère Paul, hors d’haleine, atteint le marchepied, et se jette d’un bond dans la voiture.

— Crac !

— T’es-tu blessé ? dit l’oncle Scipion.

Frère Paul se retourna : la culotte neuve avait craqué sous l’effort, du haut en bas, dans le même lieu que la précédente.

— Cuirs de laine, tissus, coutils indestructibles, s’écria-t-il, que le tonnerre les puisse brûler et ceux qui les vendent ! Je repasserai certainement par cette route pour étrangler ce marchand.

— Rien d’étonnant, dit le voyageur, ce sont des tissus à moitié prix et moitié coton.

— Une étoffe neuve ! répétait l’oncle Scipion émerveillé ; nous avions autrefois de bons draps et de bons velours qui nous tenaient quinze ans durant à l’échine.

— Beau mérite ! dit le voyageur, on les faisait à force de temps et de bras, avec de belles laines, de bonnes soies, et on les vendait un louis l’aune. Aujourd’hui l’on travaille à la mécanique, on utilise le coton, la bourre, on fabrique cent balles par jour, et…

— Et l’on montre sa peau comme moi, interrompit frère Paul.

Le voyageur, pardonnant cette saillie à la mauvaise humeur de frère Paul, changea de propos.

— Voici la nuit. Dans quatre heures au plus tard, nous arriverons au chemin de fer, et vous verrez là des merveilles. Nous tomberons à Paris en un saut.

En effet, nos voyageurs fatigués avaient à peine fait un