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Scipion passait pour riche dans le temps qu’il vendait du drap, et l’on croyait qu’il était sorti de France avec une grosse fortune en portefeuille.

Il y avait du vrai à cela ; mais la plupart de ces papiers avaient perdu leur valeur par suite des événements politiques ; la fortune s’était réduite à quelques milliers de livres, au moyen de quoi l’oncle Scipion était encore devenu le plus gros seigneur du canton qu’il habitait. Il possédait en propre une maisonnette bien bâtie, un jardin, un troupeau, et, par-dessus tout, l’amitié de frère Paul, qui ne lui avait rien coûté.

Celui-ci fut le premier averti de l’arrivée de la lettre. On s’assembla pour la lire, tous les voisins en furent, y compris Catherine, la fille qui gardait les vaches. La lettre parlait ainsi :


Paris, 30 juin 1844.
« Mon cher et excellent oncle… »


Cette première ligne émeut l’oncle Scipion, à qui personne n’avait rien dit de si tendre depuis un demi-siècle. En effet, nul ne pensait comme son neveu, qu’il eût encore quinze mille livres de revenu. Mais l’oncle Scipion, à mille lieues d’un tel commentaire, sentit une larme rouler dans ses yeux.


« Mon cher et excellent oncle,

» Vous approuverez les motifs qui m’ont engagé à respecter votre long silence. Je devais attendre que le souve-