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Bien administrer l’économie revient à savoir ce qui est et prévoir ce qui sera. Prévision faite de sagesse et de prudence et qui répudie tout ce qui ressemble à une spéculation hasardeuse.[1]

Le jour où l’homme pourra davantage prévoir le devenir social et connaître les effets de son action, il accroîtra dans des proportions immenses sa maîtrise sur les choses. Celle-ci commence par la maîtrise sur la matière grâce à la technique sous toutes ses formes ; elle devra aboutir à la maîtrise de la société et de ses conditions de vie heureuse et un jour à la maîtrise de l’homme sur lui-même.

II. — DIFFICULTÉ ET COMPLEXITÉ DU PROBLÈME.

Dans le stade actuel, la prévision sociologique est aussi difficile que la prévision météorologique il y a encore cinquante ans. C’est déjà s’avancer vers des solutions que d’essayer de bien poser le problème.

De tous les êtres connus, l’homme est le plus complexe. Or, une société est le complexe de ces complexes et la société universelle est le complexe des complexes des complexes. Dans la société elle-même il y a des prévisions simples, par ex. les quantités de marchandises qui seront produites et les prix qu’elles atteindront. Il y a la prévision complexe, par ex. la capacité de tirer par avance les conséquences d’un fait politique, social, diplomatique, il y a pré-vision (connaissance), le pré-sentiment (sentiment) et la pré-action, prévoyance (action). Ces trois termes sont à distinguer. Ils correspondent aux trois caractères fondamentaux de l’être humain qui sont connaissance, sentiment et action. Des individus à un haut degré ont l’esprit de prévision, d’au-

  1. Il y a de grands anticipateurs. Un Verne, un Karl Marx, un H. G. Wells. Celui-ci récemment a réclamé devant la radio la prévision de l’avenir pour préparer à la vie future. « The Listener Journal officiel de la British Broadcasting Corporation » a publié en réponse une série d’articles répondant à Wells sur l’utilité et le rôle des « Prophètes ». L’homme d’État est bien celui « qui a de l’avenir dans la tête ».