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Ainsi, en Allemagne, la jeunesse des universités a rêvé gloire, empire, césarisme, résurrection du passé. Elle a porté Hitler au pouvoir.

En France, M. Gonzague Truc a fait une enquête sur des jeunes gens d’après-guerre. Les réponses ont été assez disparates. « Les jeunes gens d’aujourd’hui sont des épicuriens, estime le poète Jean Dars ; ils se rangent en deux classes inégalement nombreuses. Les uns sont brutaux et scientifiques ; les autres intellectuels et raffinés. La guerre a beaucoup accru le nombre des premiers ; les seconds ne laissent pas d’avoir des puissances d’enthousiasme et d’action. »

M. R. Garni, la cheville ouvrière des Equipes sociales, décrit « une jeune génération qui regarde la vie en face et la prend au sérieux, qui a le culte de toutes les réalités : le métier, la terre, la petite et la grande patrie ; qui veut être documentée et instruite pour choisir les exemples et les idées dont elle fera les guides d’une action tenace et soutenue et qui, dans l’ordre religieux, poussa ce réalisme jusqu’à son application suprême : la pratique intégrale de la Foi ». Abel Lefranc constate que tout ce qui vit de l’esprit est relégué au second plan et que nous assistons à la chute des vieilles valeurs. Pour M. Doyen ceux qui ont 20 ans se départagent en deux groupes : les idéalistes qui ont été déçus par la guerre et qui se consolent par les joies de l’art et le réconfort de la religion ; et les autres, les réalistes qui courent aux plaisirs faciles et se promettent de gagner beaucoup d’argent pour les payer et les développer encore. Guy Grand, l’apologiste de la démocratie apporte son témoignage. Ni romantiques, ni romanesques, ni très dépravés, ni profondément curieux d’esprit, ni solidement cultivés, ni activement religieux ou patriotes, et nullement extrémistes, les jeunes gens d’aujourd’hui n’ont guère de projets qui débordent leur avenir personnel. Ils seront à celui qui les prendra. Mais on ne les prendra que par l’exemple, car les rhéteurs les dégoûtent. M. Tisserand fait remarquer que ce n’est pas seulement la jeunesse qu’il faut étudier, mais l’en-