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blir les étapes évolutives du roman et encore moins de le diviser eu phases tranchées[1]. Les classifications et les dénominations, sous des rubriques vagues, ne servent, en critique littéraire, qu’à amener un vrai désordre d’idées. L’application d’une èpithète ne signifie rien et la division des écrivains par chapelles ou écoles est une tentative vaine. Taine disait : « Tout livre et tout homme peut se résumer en cinq pages et ces cinq pages en cinq lignes. » La critique littéraire se réduirait ainsi à une sèche collection de formules. Or, l’œuvre d’un romancier est un vaste ensemble où tout est essentiellement inégal, même quand tout obéit aux mêmes lois du talent et de l’originalité de l’auteur. Plus l’œuvre est diverse, plus elle a besoin d’être analysée au point de vue de psychologie critique, pour que rien ne soit négligé dans l’infinie complexité de ses éléments constitutifs.

Toute formule, même lorsqu’elle synthétise l’analyse, est dogmatique, et tout dogmatisme, de quelque nature qu’il soit, a des dangers, il est forcément conventionnel, ennemi de la curiosité, de la libre recherche et de la libre critique. Les formules exigent le sacrifice de la clarté et de la vérité, elles réclament la séparation nette des écoles et des influences dont les origines et les définitions sont, le plus souvent, terriblement obscures. Certes, il y a entre les diverses manifestations littéraires et la vie sociale d’un pays une liaison

  1. Cet ouvrage est composé, en grande partie, d’un cours professé, sous une forme différente, à l’Université Nouvelle de Bruxelles.