clair ». Elle se portait extérieurement par-dessus le vêtement, tandis que les autres forçats avaient des fers formés non d’anneaux mais de quatre tringles épaisses comme le doigt et réunies entre elles par trois anneaux qu’on portait sous le pantalon. À l’anneau central s’attachait une courroie, nouée à son tour à une ceinture bouclée, sur la chemise.
La grande porte de la prison, solide, toujours fermée, gardée par des sentinelles, ne s’ouvrait que quand les condamnés allaient au travail… — « Derrière cette porte se trouvaient la lumière, la liberté ; là vivaient des gens libres. On se représentait un monde merveilleux, fantastique comme un conte de fées ; il n’en était pas de même du nôtre, tout particulier, car il ne ressemblait à rien ; il avait ses mœurs, son costume, ses lois spéciales : c’était une maison morte-vivante, une vie sans analogue et des hommes à part. »
Ils étaient en tout deux cent cinquante dans la maison de force. Ce nombre était presque invariable, car lorsque les uns avaient subi leur peine, d’autres criminels arrivaient, il en mourait aussi. Et il y avait là toutes sortes de gens. Chaque gouvernement, chaque contrée de la Russie avait fourni son représentant. Il y avait des étrangers et même des montagnards du Caucase. C’étaient des criminels privés de tous leurs droits civils, membres réprouvés de la société, vomis par elle, et dont le visage marqué au fer devait éternellement témoigner de leur opprobre. Chaque crime, quel qu’il soit, y était représenté.
Après le travail, on faisait rentrer les condamnés dans la caserne et on les enfermait pour toute la nuit. La chambre était basse, longue, étouffante, éclairée à peine par des chandelles ; il y traînait une odeur lourde et nauséabonde. « Je ne puis comprendre, dit Dostoïevsky, comment j’y ai vécu quatre ans entiers. » Son lit se compo-