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CARRIC-THURA.

blancs. Cathulla rencontra le chef : un combat terrible s’engagea. Frothal fut enchaîné dans le palais : trois jours il y languit seul, le quatrième, Sarno le renvoya à son navire et Frothal retourna dans son pays. Mais la fureur s’amassait dans son âme contre le noble Cathulla. Lorsque d’Annir s’éleva la pierre de renommée, Frothal revint avec toutes ses forces ; le feu de la guerre environna Carric-thura et les murailles moussues de Sarno.

Le matin se lève sur Inistore. Frothal frappe son noir bouclier : ses chefs tressaillent à ce bruit ; ils se lèvent, mais leurs yeux se tournent vers la mer. Ils voient Fingal s’avançant dans sa force, et le premier parle le noble Thubar : « Qui vient pareil au cerf du désert, avec toute sa bande derrière lui ? Frothal, c’est un ennemi ! Je vois sa lance levée[1]. Peut-être est-ce le roi de Morven, Fingal, le premier des hommes. Ses hauts faits sont connus dans Lochlin ; le sang de ses ennemis est dans les salles de Starno. Irai-je lui demander la paix des rois ? Son épée c’est la foudre du ciel ! »

« Homme à la main débile, répondit Frothal, mes jours commenceront-ils dans un nuage ? Dois-je céder avant d’avoir vaincu, chef des torrents de Tora ? Le peuple dirait dans Sora : Frothal s’élançait comme un météore, mais un nuage l’a rencontré et sa renommée n’est plus. Non, Thubar, je ne céderai jamais ! Ma gloire m’environnera comme une lumière. Non, je ne céderai jamais, chef des torrents de Tora ! »

Il descendit avec le torrent de son peuple, mais ils rencontrèrent un rocher. Fingal se tenait inébranlable. Ils se brisent sur ses flancs et roulent en arrière ; mais ils ne trouvent point le salut dans la

  1. La lance levée était le signal de la guerre ; la lance baissée, celui de la paix.