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CHANT TROISIÈME.

toi, roi de la mugissante Urlor, fais cesser la guerre jusqu’à ce que Annir ait reçu la coupe des mains de Cruth-loda. »

Fondant en larmes elle se lève et arrache une boucle de ses cheveux, une boucle qui flottait à la brise sur son sein gonflé de sanglots. Corman-trunar m’offrit la coupe et m’invita à me réjouir avec lui ; je me reposai dans l’ombre de la nuit et cachai mon visage dans mon casque profond. Le sommeil descendit sur l’ennemi. Je me levai comme un fantôme errant et je perçai le sein de Corman-trunar ; Foina ne m’échappa point ; elle roula, ses seins baignés dans le sang. Pourquoi, fille des héros, pourquoi réveillas-tu ma rage ? Le matin se leva ; l’ennemi s’était évanoui comme le brouillard. Annir frappa sur son bouclier et appela son fils aux noirs cheveux.

J’arrivai couvert de sang : trois fois le roi poussa un cri de joie, semblable à l’éclat d’un vent impétueux qui, pendant la nuit, s’élance des flancs d’un nuage. Trois jours nous nous réjouîmes de la mort de nos ennemis et nous appelâmes les oiseaux voraces ; ils descendirent de tous les vents du ciel pour se repaître des ennemis d’Annir. Swaran, Fingal est seul sur sa colline de nuit. Que ta lance perce en secret le roi, et, comme Annir, mon âme se réjouira !

« Fils d’Annir, répondit Swaran, je ne tuerai point dans les ténèbres ; je marche dans la lumière ; les oiseaux de proie s’élancent alors de tous les vents du ciel. Ils sont accoutumés à suivre ma course sanglante à travers la bataille. »

Brûlante éclata la rage du roi ! Trois fois il lève sa lance étincelante, mais tressaillant, il épargne son fils et s’enfonce dans la nuit. Près du torrent de Turthor est une caverne sombre, demeure de Conban-càrglas. Là, il pose le casque des rois et ap-