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moitié sa lumière dans les vagues du couchant. L’œil rouge de Berthin regarde à travers la forêt le chasseur qui revient de nuit, avec les dépouilles du chevreuil bondissant. Au milieu, brille large et sans nuage la lumière de Ton-théna, cette étoile qui guida sur les flots agités, la course de Larthon ; Larthon, le premier de la race de Bolga, qui voyagea sur les vents. Ce roi avait déployé ses blanches voiles vers Inis-fail des torrents ; la nuit obscure déroula devant lui ses voiles de brouillard. Les vents étaient contraires et le roulaient de vague en vague. Alors Ton-théna à la chevelure de feu se leva et sourit du haut de son nuage divisé. Larthon bénit le rayon bien connu qui brillait faiblement sur l’abîme.

Sous la lance de Cathmor résonne cette voix qui réveille les bardes. Ils arrivent de tous côtés errant dans les ténèbres et précédés des sons de leurs harpes. Le roi se réjouit à leur vue, comme le voyageur, dans un jour de soleil, quand il entend le murmure éloigné de quelque frais ruisseau qui tombe, dans le désert, du rocher des chevreuils.

Pourquoi, dit Fonar, entendons-nous la voix du roi aux heures de son repos ? Les fantômes obscurs de tes pères sont-ils descendus dans tes rêves ? Peut-être se tiennent-ils sur ce nuage et attendent-ils les chants de Fonar. Souvent ils descendent dans les plaines où leurs fils doivent lever la lance. Ou bien, notre voix chantera-t-elle pour celui qui ne lève plus la lance ; pour celui qui consumait la bataille,[1] le fils de la verdoyante Moma ? »

Ce nuage des batailles n’est point oublié, ô barde des temps passés. Sa tombe, séjour de la gloire, s’élèvera sur la plaine de Lena. Mais en ce moment ramène mon âme aux siècles de mes pères, aux années où, pour la première fois, ils se levèrent sur les

  1. Foldath.