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météores ; je vois les nuages bleus qui les couronnent. Que la joie aille à ta rencontre, ô mon frère ! Pour nous, nous sommes tristes et sombres ! Je vois le vieillard environné d’ennemis, je vois la décadence de sa gloire. Tu restes seul dans le champ des combats, ô roi de Selma, ô roi aux cheveux blancs ! »

Je déposai Fillan dans la caverne du rocher, près le rugissement du nocturne torrent. Une étoile rouge brillait sur le héros, et le vent, par intervalles, soulevait ses cheveux. J’écoute : je n’entends aucun souffle : le jeune guerrier s’est endormi pour toujours ! Comme un éclair sur la nue une pensée passe à travers mon âme. Mes yeux roulent dans le feu ; je marche à grands pas et mes armes retentissent. « J’irai te trouver, roi d’Érin ! au milieu de tes mille guerriers, je t’irai trouver ! Pourquoi m’échapperait-il, ce nuage qui vient d’éteindre notre jeune astre ? Sur vos collines, ô mes pères, allumez vos météores, éclairez mes pas audacieux ! Je veux consumer dans mon courroux… — Mais ne dois-je pas revenir ? Le roi est sans enfants ! vieux et en cheveux blancs, il est seul au milieu de ses ennemis ! Son bras n’est plus ce qu’il fut autrefois, et sa gloire s’obscurcit dans Érin. Ah ! que je ne le voie pas couché sur son dernier champ de bataille ! — Mais puis-je revenir vers le roi ? Ne m’interrogera-t-il pas sur son fils ? » Tu devais défendre le jeune Fillan. » — Ah ! Ossian ira trouver l’ennemi ! Verdoyante Érin, le bruit de ta marche est agréable à mon oreille. Je vais fondre sur les rangs de ton armée pour éviter les regards de Fingal ! — Mais j’entends la voix du roi sur la cime brumeuse du Mora ! Il appelle ses deux fils ! Dans ma douleur, j’accours, ô mon père, j’accours comme l’aigle que la flamme de la nuit a surpris dans le désert et qu’elle a dépouillé de la moitié de ses ailes ! »