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vents. La faible lueur de la lune tremble sur Moi-lena à travers les larges têtes des arbres de la colline ! À sa lumière, élève des tombes à tous ceux qui sont tombés dans la bataille. Quoique tous ne fussent pas des chefs, leurs bras cependant étaient puissants dans le combat : ils étaient mon rocher dans le danger ; la montagne d’où je déployais mes ailes d’aigle. C’est par eux que je suis célèbre ! Carril, n’oublie point ceux qui sont tombés ! »

Tous à la fois les cent bardes entonnent les chants de la tombe. Carril devant eux marche à pas solennels ; et leurs voix, à sa suite, murmurent comme les torrents. Le silence habite les vallées de Moi-lena où chacune, avec son ruisseau ombragé, serpente à travers les montagnes. J’entendais la voix des bardes s’affaiblir à mesure qu’ils s’éloignaient. Penché sur mon bouclier, je sentis se rallumer le feu de mon âme, et à demi formées, les paroles de mes chants jaillissaient sur la brise. Ainsi un arbre, dans la vallée, entend autour de lui la voix du printemps ; il étale ses vertes feuilles au soleil et balance sa tête solitaire : auprès de lui est le bourdonnement de l’abeille des montagnes, et le chasseur, de la bruyère dévastée, le contemple avec joie.

Le jeune Fillan se tenait à quelque distance. Son bouclier brillait sur la terre ; sa brune chevelure était livrée au vent. Le fils de Clatho est un astre de lumière ! Appuyé sur sa lance il écoutait avec joie les paroles de Fingal.

« Mon fils, lui dit le roi, j’ai vu tes exploits, et mon âme en a été réjouie. La gloire de nos pères jaillit de leurs nuages amoncelés. Fils de Clatho, tu es brave mais téméraire dans le combat. Quoiqu’il n’ait jamais craint l’ennemi, Fingal n’avançait point ainsi. Que ton peuple soit un rempart derrière toi : c’est là ta force dans la bataille ! C’est ainsi que tu