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LIVRE TROISIÈME

Des brumes épaisses du Mora, les enfants de Morven entendent la voix de Fingal. Les bardes versent leurs chants, comme la rosée, sur les guerriers qui reviennent.

« Qui vient de Strumon, disaient-ils, au milieu de ses boucles flottantes ? Elle est triste dans sa démarche, elle lève ses yeux bleus sur Érin. Pourquoi es-tu triste, Evir-choma ? En renommée, qui est semblable à ton chef ? Terrible il est descendu au combat, il revient, comme d’un nuage remonte une lumière. Dans son courroux il a levé l’épée et les ennemis ont reculé devant le bouclier bleu de Gaul !

« La joie, comme une brise frémissante, vient sur l’âme du roi. Il se rappelle les batailles d’autrefois, les jours où ses pères ont combattu. Les jours d’autrefois reviennent à l’esprit de Fingal, lorsqu’il contemple la gloire de son fils. Comme le soleil, sur son nuage, se réjouit dans l’arbre que ses rayons ont fait croître, lorsqu’il balance sur la plaine sa tête solitaire ; ainsi le roi se réjouit dans Fillan !

« Comme le roulement du tonnerre sur les montagnes, quand les plaines de Lara sont tranquilles et sombres, tels sont les pas des guerriers de Selma, agréables mais terribles à l’oreille ! Ils reviennent dans le bruit de leurs armes, comme des aigles vers leurs rocs sourcilleux, quand ils ont, sur la plaine, déchiré leur proie, les fils au poil fauve des biches bondissantes. Vos pères, enfants de Selma, se réjouissent sur leurs nuages ! »

Telle était la voix nocturne des bardes sur Mora des chevreuils. La flamme s’élève de cent chênes que les vents ont arrachés du sommet du Cormul. Le festin est étalé : autour sont assis les chefs étincelants : Fingal s’y montre dans sa puissance. La plume d’aigle de son casque s’agite avec bruit. Les vents d’ouest se lèvent et soufflent par intervalles à travers la nuit. Longtemps le roi promène en silence