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cheveux pris flottent sur la brise. Il tire à moitié l’épée de Luno, et ses yeux, tournés vers Moi-lena[1], suivent les sombres mouvements de l’ennemi. — Entends-tu la voix du roi ? Elle est comme la chute écumante d’un torrent dans le désert, lorsqu’à travers les rochers retentissants, il s’avance vers les plaines brûlées par le soleil !

« L’ennemi descend en déployant ses vaste ailes ! Fils de la Selma des bois, levez-vous ! Soyez comme les rochers de notre pays, sur les flancs desquels se précipitent les torrents. Un rayon de joie se lève dans mon âme, car je vois les ennemis en force devant moi. C’est quand ils sont faibles qu’on entend les soupirs de Fingal ; il craint alors que la mort n’arrive sans renommée et que les ténèbres n’habitent sur sa tombe. Qui conduira mes guerriers contre l’armée d’Alnecma ? Mon épée ne doit briller que lorsque le danger s’accroît : telle fut autrefois la coutume de Trenmor, l’arbitre des vents ! Tel Trathal au bouclier bleu descendait jadis dans la bataille !

Les chefs se penchent vers le roi : chacun semble réclamer le commandement de l’armée. Ils racontent en partie leurs glorieuses actions et tournent leurs regards vers Érin. Mais, loin du reste des héros, se tient le fils de Morni : il garde le silence ; car qui n’a entendu parler des batailles de Gaul ? Son âme se les rappelle, et sa main, en secret, se pose sur son épée ; cette épée qu’il apporta de Strumon, alors que s’éteignit la force de Morni.

Fillan de Selma s’appuyait sur sa lance et ses cheveux ondovaient à la brise. Trois fois il leva les yeux sur Fingal ; trois fois sa voix expira sur ses lèvres. Mon frère ne pouvait vanter ses combats : soudain il s’éloigne à grands pas. Penché sur un

  1. Moi-lena, plaine de Lena.