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auguste étranger[1] ! es-tu des amis de Cormac ? Mais, Carril, il est sombre et sans beauté. Il tire son épée : barde des vieux temps, est-ce là le fils d’Usnoth ? »

« Ce n’est pas le fils d’Usnoth, s’écria Carril, c’est Cairbar, ton ennemi ! Pourquoi parais-tu dans tes armes à Témora, chef au sinistre front ? Ne lève point ton épée contre Cormac ! où portes-tu tes pas ? » — Sans répondre il s’avance sombrement et saisit la main du roi. Cormac prévoit sa mort ; la rage étincelle dans ses yeux. — « Retire-toi, chef d’Atha ! Nathos approche et la guerre avec lui. Tu es audacieux dans le palais de Cormac, parce que son bras est faible ! » L’épée entre dans le flanc du roi ; il tombe dans le palais de ses pères : ses blonds cheveux traînent dans la poussière et son sang fume autour de lui.

« Et tu tombes dans ton palais, dit Carril, ô fils du noble Artho ! Que n’avais-tu près de toi le bouclier de Cuthullin ou la lance de ton père ! Le deuil est sur les montagnes d’Érin, car le chef du peuple est abattu ! Bienheureuse soit ton âme, ô Cormac ! Tu t’es éteint dans ta jeunesse ! » Ces paroles arrivèrent aux oreilles de Cairbar. Il nous enferma au milieu des ténèbres. Il craignait de lever son épée sur les bardes, quoique son âme fut criminelle. Longtemps nous languîmes dans la solitude : enfin arriva le généreux Cathmor. De la caverne il entendit notre voix et tourna sur Cairbar les yeux de son courroux.

« Frère de Cathmor, dit-il, jusqu’à quand affligeras-tu mon âme ? Ton cœur est un rocher, et tes pensées sont noires et sanguinaires ! Mais tu es le frère de Cathmor ; et Cathmor brillera dans tes guerres. Mon âme cependant ne ressemble pas à la

  1. Cairbar entre dans le palais.