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voyageur voit ces arbres charmants et s’étonne qu’ils croissent si solitaires ; le vent du désert vient pendant la nuit et couche sur la terre leurs têtes verdoyantes. Il revient le lendemain ; mais ils sont flétris et la bruyère est nue !

Dar-thula, dans sa douleur, se tenait silencieuse et contemplait leur chute. Pas une larme dans ses yeux, mais son regard est sauvagement triste. Sa joue est pâle, de ses lèvres tremblantes tombent des mots brisés et à demi formés et sa noire chevelure flotte sur le vent.

Le farouche Cairbar arrive. « Où est maintenant ton amant, où est le chef d’Etha ? As-tu vu les salles d’Usnoth, ou les sombres collines de Fingal ? La bataille aurait rugi dans Morven si les vents n’avaient pas rencontré Dar-thula. Fingal lui-même eût succombé et la tristesse eut habité dans Selma ! Le bouclier de Dar-thula tombe de son bras. Son sein de neige se découvre. Il se découvre, mais il est taché de sang : à son flanc une flèche était fixée ! Comme un flocon de neige elle tombe sur Nathos. Sa chevelure couvre le visage de son héros et leur sang se mêle autour d’eux !

« Tu n’es plus, ô fille de Colla, dirent les cent bardes de Cairbar. Le silence est sur les bleus torrents de Selama : la race de Truthil est éteinte. Quand te lèveras-tu dans ta beauté, ô la première des jeunes filles d’Érin ? Ton sommeil est long dans la tombe : le matin est bien éloigné. Le soleil ne viendra plus à ton lit pour te dire : « Éveille-toi, Dar-thula, éveille-toi, ô la première des femmes ! le vent du printemps est dehors ; les fleurs balancent leurs têtes sur les vertes collines et les forêts bercent leurs feuilles épanouissantes. Retire-toi, ô soleil, la fille de Colla est endormie ! Elle ne sortira plus dans sa beauté elle ne s’avancera plus dans la grâce de ses pas ! »