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Le roi de Morven s’était réveillé subitement, tandis que nous roulions sur la vague sombre et bleue. Il porta sa main à sa lance, et ses héros se levèrent autour de lui. Nous comprîmes qu’il avait vu ses pères, car souvent ils descendent dans ses songes, quand l’épée de l’ennemi est levée sur son pays et que la bataille s’assombrit autour de nous. — « Pourquoi as-tu fui, ô vent ? s’écria le roi de Morven ; frémis-tu dans les vallons du midi, ou poursuis-tu la pluie dans les autres contrées ? Pourquoi ne souffles-tu point dans mes voiles et sur la surface bleue de mes vagues ? L’ennemi est dans la terre de Morven et le roi est absent. Que chacun se couvre de son armure et saisisse son bouclier. Étendez vos lances sur les flots, et que chaque épée soit tirée du fourreau. Lathmon est devant nous avec son armée ; Lathmon, qui a fui devant Fingal sur les plaines de Lona. Mais il revient comme un torrent grossi, et son rugissement est entre nos collines. »

Telles furent les paroles de Fingal. Nous entrâmes dans la baie de Carmon. Ossian gravit la colline et trois fois il frappa les bosses de son bouclier. Le rocher de Morven répondit et les biches s’enfuirent en bondissant. L’ennemi se troubla en ma présence et rassembla son armée. Je me tenais comme un nuage sur la colline, me réjouissant dans les armes de ma jeunesse.

Morni était assis sous un arbre, près des eaux rugissantes de Strumon. L’âge a blanchi ses cheveux : il s’appuie sur son bâton ; le jeune Gaul est auprès du héros, prêtant l’oreille aux combats de son père. Souvent, dans le feu de son âme, il se lève au récit des hauts faits de Morni. Le vieillard entendit le son du bouclier d’Ossian : il reconnut le signal de la guerre. Aussitôt il se lève de sa place ; ses cheveux blancs se partagent sur ses épaules : il se rappelle les actions îles années évanouies.