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sur son sein sa longue chevelure. Elle prête l’oreille à la brise de la nuit pour entendre la voix de tes rameurs ; pour entendre le chant de la mer et le son de ta harpe éloignée ! »

« Et longtemps elle écoutera en vain : Cuthullin ne reviendra jamais. Comment pourrais-je revoir Bragela et réveiller les soupirs de son sein ? Fingal, je fus toujours victorieux dans le combat des lances ! » — « Et tu le seras encore, reprit Fingal, roi des coupes généreuses. La renommée de Cuthullin grandira comme l’arbre touffu du Cromla. Bien des batailles t’attendent, ô chef ! bien des blessures seront faites par ta main ! Oscar, apporte ici le chevreuil et prépare le festin des coupes. Que nos âmes se réjouissent après le danger et que nos amis soient heureux en notre présence ! »

Nous nous assîmes ; nous prîmes part au festin ; nous chantâmes. L’âme de Cuthullin se releva. La force de son bras revint et la joie éclaira son visage. Ullin nous donna ses chants, Carril éleva la voix ; je me joignis aux bardes et je chantai les batailles de la lance : batailles où j’ai souvent combattu ! Mais aujourd’hui je ne combats plus ! La gloire de mes anciens exploits s’est évanouie ; et, triste, je m’assieds sur les tombes de mes amis !

Ainsi la nuit se passa dans les chants et le matin nous retrouva dans la joie. Fingal se lève sur la bruyère et agite sa lance brillante. Le premier il s’avance vers les plaines de Lena et nous le suivons avec nos armes. « Déployez les voiles, dit le roi, et profitez des vents qui descendent de Lena. » En chantant nous montons sur les vagues ; avec joie nous volons sur l’écume de l’abîme.


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