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Gormal. Rouge était sa joue et blonde sa chevelure. Sa peau était semblable à la neige de Morven. Son œil bleu et souriant roulait avec douceur lorsqu’il s’adressa au roi des épées.

« Arrête, Trenmor, arrête, toi le premier des hommes ; tu n’as pas vaincu le fils de Lonval. Mon épée souvent a rencontré le brave et le sage évite la force de mon arc. » — Jeune homme aux blonds cheveux, répondit Trenmor, je ne combattrai point le fils de Lonval. Ton bras est faible, ô rayon de jeunesse ! Retire-toi, et va poursuivre les biches brunes du Gormal. » — « Je me retirerai, répliqua le jeune homme, mais avec l’épée de Trenmor, et me réjouissant dans le bruit de ma gloire. Les vierges environneront en souriant celui qui vainquit le puissant Trenmor. Elles soupireront avec des soupirs d’amour ; elles admireront la longueur de ta lance quand je la porterai au milieu d’elles, et que j’en lèverai au soleil la pointe étincelante. »

Jamais tu n’emporteras ma lance, dit le roi courroucé de Morven. Ta mère te trouvera pâle, sur le rivage, et, regardant sur l’abîme sombre et bleu, elle verra les voiles de celui qui a tué son fils ! » — « Je ne lèverai point la lance, dit le jeune homme, la force des années manque encore à mon bras. Mais, de ma flèche ornée de plumes, j’ai appris à percer de loin mon ennemi. Jette cette lourde cotte d’armes qui te protège contre la mort. Le premier je poserai la mienne sur la terre. Lance maintenant ton trait, roi de Morven ! » Trenmor vit le gonflement de son sein : c’était la sœur du roi de Lochlin. Elle l’avait vu dans le palais et avait aimé la jeunesse de son visage. La lance tombe des mains de Trenmor : il baisse vers la terre sa joue vermeille. Elle était pour lui ce rayon de lumière qui rencontre les enfants de la caverne, lorsqu’ils revoient les plaines du soleil et qu’ils baissent leurs yeux blessés.